Après le dialogue social, la nécessité du dialogue syndical

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Cyril Comte président du Medef réagit au récent coup de force du Collectif du 5 février sur le prix des pièces détachées, et donne sa vision du dialogue social en Martinique.

A la suite des conflits sociaux qui ont secoué la Martinique en 1999, le patronat Martiniquais et certains syndicats ont réussi à se mettre autour d’une table pour dire : « plus jamais ça ! ». Accompagnés par l’Institut National du Travail, un groupe d’entrepreneurs et de syndicalistes ont ainsi passé du temps à regarder les expériences extérieures à la Martinique pour imaginer les solutions pour sortir du piège d’une confrontation sociale mutuellement destructrice. Après avoir rédigé une Charte du Dialogue Social, signées par la plupart des organisations syndicales et patronales, l’Association pour le Dialogue Social en Martinique (ADSM) s’est créée pour pérenniser la démarche et poursuivre l’action de rénovation des rapports sociaux. De ce mouvement sont nés également les médiateurs du dialogue social, binômes de syndicalistes et de chefs d’entreprises, nouveaux pompiers volontaires des conflits sociaux, qui ont montré leur utilité et leur efficacité à de nombreuses reprises.

Ainsi, dix ans après, nous pouvons saluer les progrès du dialogue social dans les entreprises en Martinique. Les chefs d’entreprise ont compris que le dialogue social passait par la vitalité des Institutions Représentatives du Personnel au sein de leurs organisations. Au MEDEF Martinique, 95% de nos entreprises-membres ont des IRP en fonctionnement. Dans ce climat de confiance régulièrement approfondi, ils ont vu la représentation des salariés progresser en qualité et en responsabilité pour devenir des partenaires du développement, soucieux de la réussite de leur outil de travail. Ces progrès se sont traduits par une très forte réduction des jours de grève et –on peut l’imaginer- par une mobilisation accrue des salariés en faveur du développement de leurs entreprises. Ce mouvement s’est ainsi accompagné d’une période de croissance unique qui a bénéficié à tous, en particulier par la réduction du chômage dans des proportions inespérées, puisqu’il est passé de 28% de la population active en 2000 à 22% en 2009. Aujourd’hui, sa remontée à presque 30%, ruine tout espoir de reprise économique solide et rapide pour notre département pour les 3 ans à venir.

Les progrès du dialogue social n’ont cependant pas dépassé le cadre des entreprises. En dehors des syndicalistes et chefs d’entreprises impliqués au sein de l’ADSM, les centrales syndicales locales ont vécu ces progrès du dialogue social comme un affaiblissement de leurs rôles, au lieu de le ressentir comme le résultat d’un succès partagé, alors même qu’ils avaient participé pleinement de cette évolution lorsque ce mouvement de sensibilisation et d’éducation des chefs d’entreprise et de leurs salariés a été lancé.

Aujourd’hui, il nous faut donc réussir le défi du dialogue syndical, alors même que la création hétéroclite et ambigüe du Collectif du 5 février rend ce défi tellement plus difficile. Il n’y a pas d’autre voie pourtant car cet échec du dialogue syndical pourrait se révéler mortifère et remettre en cause les progrès que nous avons accompli collectivement dans le dialogue social au sein des entreprises. Les syndicats, trop affaiblis par un discours purement idéologique, ont quitté le champs de la défense des intérêts matériels et moraux des salariés pour prendre en charge un discours de lutte contre la vie chère, avec lequel il s’autorise toutes les dérives, sans pour autant l’approcher avec l’objectivité nécessaires au traitement d’une telle question. Dans ce domaine, on a vu que la crise de février 2009 aura produit les effets inverses de ceux imaginés par de nombreux Martiniquais de bonne foi en fragilisant plus que tout l’écosystème des petites entreprises, et en particulier les entreprises de créations récentes.

Pour réussir le dialogue syndical, il convient de rétablir des échanges fréquents et respectueux entre organisations patronales et syndicales locales et représentatives, pour que chacun puisse faire le pari de la confiance et enfin se mettre à débattre sérieusement des questions qui préoccupent les salariés. Cela signifie qu’il convient de travailler avec sincérité et détermination à la participation maximum des centrales syndicales locales au fonctionnement des instances paritaires. C’est en effet là qu’il est entretenu au quotidien par les mandataires respectifs des syndicats de salariés et patronaux. C’est le travail qui est précisément entrepris actuellement avec le soutien de la Direction du Travail et dans lequel le MEDEF est pleinement impliqué à travers la Commission Paritaire d’Interprétation et de Suivi. Vouloir le développement d’un dialogue syndical constructif, c’est vouloir des syndicats renforcés plutôt que des syndicats qui ne trouvent de moyen d’exister qu’au travers de rapports conflictuels si destructeurs pour notre fragile tissu économique.

La Martinique mérite un vrai dialogue syndical fondé sur le respect et la volonté partagé de favoriser le développement économique de notre région afin de créer les emplois nécessaires à l’épanouissement de la population et à l’accueil de notre jeunesse.

Le travail doit commencer maintenant.


Cyril Comte
Président du MEDEF Martinique