Créer de la « stabilité » pour le développement

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Cyril COMTE France-Antilles Martinique 19.10.2010

Les éléments d’informations concernant le programme de loi de finances pour 2011, confirmés par les diverses déclarations de madame la ministre en charge de l’Outremer, donnent à penser qu’au nom de l’effort collectif, les dispositifs d’aides en faveur de l’investissement outre-mer seraient, une fois de plus « rabotés ».
Si l’effort demandé à l’Outre-mer était effectivement proportionnel à celui demandé aux autres régions de la nation, il aurait pu être compris et accepté. Mais l’effort réclamé à l’Outre-mer est disproportionné et injuste, comme nous le montrerons ci après.
Pire, le PLF 2011 en ce qui concerne les territoires d’Outre-mer, est en totale contradiction avec l’affichage des priorités retenues dans le texte de la LODEOM, et dans les mesures du CIOM, qui avaient été confirmées par le Président de la République lors de ses différents déplacements outre Mer, et par les ministres.
Revenons un instant sur les raisons qui avaient conduit les gouvernements successifs à élaborer des dispositifs spécifiques de soutien au développement de la France d’outre mer.
Ces raisons sont objectives et connues :
 Eloignement et exiguïté des territoires, entraînant tout à la fois surcoûts d’approvisionnement et surcoûts de production
 Sous-développement économique entraînant un taux de chômage plus de 2 fois supérieur à celui de la métropole
 Localisation des territoires d’Outre-mer soumis à la réglementation française du travail et des affaires dans des environnements ou le coût du travail est moins élevé et la réglementation moins contraignante. Ces contraintes sont d’ailleurs reconnues par l’Europe (avec un traitement spécifique des RUP)
En votant la loi « Girardin » en 2003 le gouvernement de l’époque avait voulu donner aux chefs d’entreprise et aux investisseurs un cadre enfin stable pour 15 ans. A peine votée et commençant à produire ses effets la loi était bouleversée, vidée d’une bonne partie de ses effets et remplacée par la LODEOM.
LODEOM qui n’est toujours pas totalement appliquée dans les dispositifs d’aides (à ce jour comme l’indique fort justement le rapport des députés Yanno et Bartolone, 34% des décrets d’application ne sont toujours pas pris) mais qui l’est en revanche pour tous les dispositifs visant à la suppression des mesures favorables de la loi Girardin.
Ce sont ainsi 400 millions d’euros perdus pour l’Outre-mer lors de la loi de finances de 2009 :
 250 millions d’euros dans le cadre du logement compte tenu de la disparition du financement du logement libre et intermédiaire,
 10 millions d’euros dans le cadre des investissements productifs compte tenu des restrictions sur les véhicules automobiles et navires de plaisance,
 60 millions d’euros au titre de la baisse des exonérations sociales,
 120 millions suite à la disparition de la TVA NPR .
Aujourd’hui, la LODEOM balbutiante se voit « rabotée » , non pas une fois de 10% comme les autres « niches fiscales » , mais 2 fois par la suppression totale de la défiscalisation sur les investissements photo-voltaïques.
En effet, l’effort national porte sur une « économie » de 1.2 milliard d’euros pour l’ensemble du territoire : l’effort de l’Outremer aurait donc dû être de 120 millions d’euros alors qu’il sera de 330 millions répartis de la façon suivante :
 230 millions d’euros au titre de la décision brutale d’inéligibilité des installations photovoltaïques à la défiscalisation,
 100 millions d’euros au titre du « rabotage » de ce qui reste de dépense fiscale.
A ce sujet si l’on peut comprendre la nécessité d’un encadrement très rigoureux des « fermes » photovoltaïques sur des territoires où la surface disponible est limitée, la suppression du photovoltaïque en toiture est simplement incompréhensible alors que le CIOM avait acté la nécessité de limiter la dépendance énergétique aux seules centrales à énergie fossiles sur des territoires où l’énergie nucléaire ne peut exister !
La remise en cause aussi brutale des dispositifs visant à aider au financement du rattrapage économique et social de l’Outremer est un coup de poignard dans le dos de populations fortement ébranlées par les conséquences des graves crises de début 2009, et pour lesquelles le gouvernement et le Président s’étaient engagés.
Face à tant de changements aussi rapides que radicaux, les investisseurs ne peuvent s’engager, ce qui contribuera à une aggravation de la crise économique près de 3 fois plus violente en Outre-mer qu’en France métropolitaine.
Enfin sur un plan purement budgétaire il est fort probable que les économies escomptées par le gouvernement ne seront tout simplement pas au rendez-vous.
En effet, les montants calculés par le Gouvernement le sont sur la base d’investissements théoriques identiques à ceux réalisés pendant les précédentes périodes de défiscalisation.
Or, sans l’incitation fiscale, face à toutes les incertitudes liées à l’absence de visibilité et donc de confiance, les investisseurs ne franchiront pas le pas préférant des « investissements » métropolitains plus sûrs).
La rétrocession plus importante en faveur des investisseurs locaux ne sera plus qu’une illusion.
Au nom de l’équité nationale , le gouvernement doit amender le PLF 2011.